Décrocher à l’heure de l’hyper connexion

Marie-Josée ArchambaultJe ne sais pas pour vous mais l’un des grands défis auquel la dernière année – covidesque – aura confronté ma famille, comme la vôtre probablement, c’est incontestablement celui de couper les liens avec tout ce monde numérique.  Un monde qui a littéralement envahi toutes les sphères de nos vies avec la force d’un tsunami.

Au cours de la dernière année, nos amitiés se sont entretenues à coups de rencontres sur Zoom ou en «Facebook Meet», nos liens avec les collègues et nos pauses virtuelles ont été maintenus grâce à Google meet, nos cours ont pu se poursuivre en ligne, nos adolescents ont pu poursuivre leurs cours au moyen de la plateforme Teams. Même nos commandes de pharmacie et d’épicerie se sont faites en ligne par moments. C’est dire à quel point le numérique a pu investir de façon foudroyante notre vie privée! À une vitesse et d’une façon à laquelle, je serais tentée de dire, on n’aurait jamais cru si on nous avait prédit ça avant l’arrivée de la pandémie.

Chez-nous, j’ai eu la chance de profiter d’un espace de travail personnel dans la troisième chambre, inoccupée, qui est devenue mon bureau personnel depuis mars 2020. L’homme de la maison, lui, travaille depuis plus d’un un an sur la table de cuisine alors que l’ado de son côté, lors des journées d’école qu’il doit faire à distance, monopolise l’ilot de cuisine. C’est dire à quel point dans nos maisons, il ne semble plus exister de refuge!

Dans ces circonstances, ce que je constate depuis quelques temps – et je sais que je suis loin d’être la seule! - c’est qu’il est devenu excessivement difficile de considérer qu’on a fini notre journée de travail et de décrocher véritablement.

Un courriel avant souper ? Facile, on est là, à proximité alors on y répond. Pas besoin de prévoir nos déplacements alors on commence à travailler plus tôt le matin. Le midi, pas de collègue avec qui partager notre lunch ou avec qui aller marcher? Alors on mange devant l’écran. On écoute les conférences du Premier ministre et de la santé publique en direct à la télé ou sur le web, on lit le journal le matin sur notre tablette. À travers tout cela, un petit saut sur Twitter de temps en temps pour être au fait des derniers développements… L’évidence c’est que ça ne s’arrête jamais et qu’on ne décroche pas.

La vérité, je pense, c’est qu’on sous-estime combien cette infiltration du numérique dans toutes les sphères de nos vies ça peut vite devenir lourd au niveau mental. Et à quel point surtout, le fait de parler à un écran peut sembler surréaliste, même après plus d’un an d’usage. Même chose pour les adolescents qui poursuivent leurs cours en ligne. Difficile tout autant pour les professeurs de parler à un écran (dont les caméras sont parfois même éteintes!) en espérant fort que les étudiants écoutent et s’intéressent. Et plus difficile encore pour les jeunes de passer des heures devant un écran à écouter, comme devant une télé. Pour certains, c’est juste trop long! C’est difficile à tous les âges bien surs mais encore plus pour les adolescents je pense.

Alors, la question que je me pose, c’est celle-ci. Après la pandémie, comment choisirons-nous de reconnecter avec les autres, avec la vie réelle? Ceci alors que tous, nos adolescents comme nous-mêmes sommes déjà en overdose de virtuel. Aussi, alors que j’ai eu l’impression par moment que le plus grand rêve des adolescents modernes semblait être il y a peu de devenir youtubeur ou influenceur, je me demande si ce trop-plein de numérique que nous aura imposé la pandémie n’aura pas un effet sur notre façon de connecter avec les autres après.

Je suis tentée de penser que l’après-pandémie nous trouvera tous tellement carencés de liens sociaux et significatifs qu’on aura un besoin pressant de reconnecter autrement, en vrai.

Pour ma part, j’avoue que ce qui m’a aidée au cours de la dernière année ça a été de me remettre à peindre. Un cours en ligne (on n’y échappe pas!) avec le Musée des Beaux-Arts auquel j’ai assisté l’automne passé m’a en effet redonné la piqure d’un art de la peinture acrylique auquel je n’avais pas touché depuis près de vingt-cinq ans. À me voir ainsi prendre des pauses dans ma journée de travail pour aller continuer quelques minutes une toile, ça a donné envie à l’ado d’essayer lui-aussi. Et je dirais que j’ai été soufflée par l’effet énergisant que ça a eu sur moi ces petits moments de « déconnection relative». En plus bien sur de favoriser un partage avec mon ado.

C’est pourquoi j’ai trouvé vraiment intéressant de retrouver cette notion de pause créative dans cet article sur lequel je suis tombée récemment et qui donnait justement des astuces pour décrocher du télé travail. Parce que l’évidence c’est qu’à travers la créativité, on se réalise. Plus encore, c’est l’estime personnelle qui se trouve instantanément boostée. Peindre ça ramène dans l’instant, c’est presque magique.

Aujourd’hui, et plus encore en temps de pandémie, on parle beaucoup de numérique. Par la force des choses, le numérique c’est ce qui nous aura permis à tous pendant la dernière année de poursuivre de façon plus ou moins assidue nos activités, chose qui aurait été infiniment plus compliquée sans tous les moyens à notre portée de nos jours (internet, numérique, médias sociaux, etc). À preuve, ces cours de peinture en ligne auquel je n’aurais jamais pu avoir accès en pandémie sans un accès à internet.

Mais demeure qu’on aurait avantage, dans les écoles comme à la maison, à encourager les jeunes à lire plus, à trouver une passion qui les nourrisse, une activité qui les passionne. Écrire, dessiner, peindre, lire, peu importe le moyen. L’important étant assurément le plaisir de faire quelque chose qui soit significatif pour soi. Et non pas pour obtenir des Likes ou pour obtenir de la valorisation sur le web.

                                                                                                                                               

Chez-nous, j’ai la chance que l’Ado apprécie particulièrement la lecture. Mais certains titres, certains genres seulement. C’est difficile de l’encourager à explorer d’autres thématiques. Mais qu’importe, pourvu qu’il lise n’est-ce pas ? Histoire de décrocher de l’ordi ne serait-ce qu’une demi-heure par jour, plus longtemps dans le meilleur des cas.

Récemment, je suis tombée sur un article qui m’a donné lieu d’espérer que l’après-pandémie nous incitera tous à reconnecter autrement que par le numérique. Dans cet article, on raconte en effet qu’en ce moment, une tendance forte et un peu inattendue ce serait le retour du fameux jeu de société, un genre qui avait pratiquement été relégué aux oubliettes depuis des années avec l’arrivée des jeux vidéo jugés plus attrayants par les jeunes générations.

Il semblerait que le vent tourne! Et qu’on retrouve nos classiques. Des heures passées en présentiel avec de vraies personnes, ça vous dit?

La prochaine grande révolution je dirais!