Le numérique à l’image d’un jeu de serpents et échelles

Marie-Josée ArchambaultÊtre parent d’un adolescent par les temps qui courent, je serais tentée de dire que ce n’est rien de moins qu’un jeu de serpents et échelles. Je me dis parfois que c’est facile de perdre pied. Parce que ce qui nous semblait relever de l’évidence il y a quelques mois en termes de bons usages à transmettre est en train, je pense, de devenir un peu obsolète.

Aussi, la mère en moi réalise qu’en termes d’éducation numérique de mon adolescent, il ne s’agit plus aujourd’hui de lui apprendre à écrire un courriel. Mais littéralement de lui apprendre à contourner tous les pièges auxquels le numérique le confrontera inévitablement au cours de sa vie. Et cela, probablement sous une forme que je ne peux même pas imaginer aujourd’hui, le numérique évoluant beaucoup trop rapidement pour notre capacité humaine l’appréhender. Et, misère, quand on parvient enfin à s’y mettre et à maîtriser un tant soit peu une plateforme chouchou de notre ado, voilà que celui-ci  est rendu ailleurs!

La vérité c’est que de nos jours, pour un tweet maladroit, une mauvaise blague ou encore, un comportement qui ne passe plus, un rien peut faire de vous une personne boycottée, voire massivement intimidée sur les réseaux sociaux. Comme nous l’ont d’ailleurs largement démontré les événements de cet été au cours desquels on a déboulonné la statue de quelques morts, mais aussi de quelques vivants. Parmi lesquels, des vedettes qui jusque-là s’étaient crues naïvement intouchables.  

On dirait qu’aujourd’hui, ce qui se passe sur les médias sociaux est plus public que public. Un peu comme si faire le con sur les réseaux sociaux ça avait plus d’impact que faire le con devant une centaine de personnes. Et avec raison puisque le public du virtuel est sans fin et que ce qu’on y met, ça reste dans le temps. De sorte que la planète entière a le potentiel d’être témoin de ta connerie longtemps après que toi tu  l’aies oubliée. Un peu comme une agora publique, avec archives! Et à ce chapitre, il n’y a vraisemblablement pas de prescription puisque la bêtise que vous avez écrite il y a vingt ans pourrait très bien revenir vous hanter au moment où vous vous y attendez le moins.

Avec la multiplication des réseaux sociaux, jamais sans doute l’humain n’aura eu autant de moyens de communiquer et même temps qu’autant de risque de se planter. L’équivalent en s’exprimant de la mauvaise façon de se retrouver sur un champ de mines prête à vous exploser au visage à la seconde. Et en frais de numérique, les pièges se présentent ici sous les apparences les plus variées, allant de la diffamation au vol d’identité, de l’intimidation à la cyberdépendance. Pour ne nommer que ceux-là.

Bref! C’est clairement facile de perdre pied. Parce qu’en tant que parent, on veut éviter d’avoir l’air de crier inutilement au loup. On veut surtout éviter d’avoir l’air d’un dinosaure du techno face à un ado convaincu, lui, de maîtriser la situation.  Mais reste que le danger lui est là, bien réel. Pour nos ados tout autant que pour nous, il va sans dire.

L’évidence, c’est que même si on a tendance à croire que nos jeunes hyper connectés sont aussi hyper à l’aise dans ce numérique dans lequel ils baignent depuis leur naissance, la vérité c’est que ça ne signifie toutefois pas qu’ils ont les aptitudes d’analyse et de réflexion pour  bien utiliser ces outils numériques.  Ou bien, c’est qu’ils n’en ont tout simplement pas la peur comme nous.

Aussi, il m’arrive de me dire que la chose numérique est un peu à l’image d’une bête à trois têtes. Difficile à saisir dans son ensemble, en même temps qu’en constante mouvance. Et que par conséquent, je n’arriverai jamais à prémunir mon adolescent contre tous les pièges qui se présenteront inévitablement sur sa route.  D’où l’importance de les éduquer du mieux qu’on le peut pour tenter d’en faire des citoyens aptes à naviguer dans cet univers numérique en constante mouvance. Cela au moyen de ressources de nature à nous appuyer dans cette tâche parentale qui trop souvent nous dépasse.

On apprend à nos jeunes quoi faire quand il y a le feu, comment réagir si un inconnu les aborde dans la rue, de quelle façon traverser à l’intersection. Comment se comporter sur les réseaux sociaux devrait être aussi basique.

Nous avons beau savoir qu’en tant que parents nous sommes le premier modèle de nos jeunes, reste cette vérité que pour la majorité d’entre nous, nous apprenons sur le tas. Et c’est sans doute là je pense que l’éducation à la littératie numérique  et les  ressources produites par HabiloMédias prennent tout leur sens. Ne serait-ce que pour nous donner un point de départ permettant d’ouvrir la discussion avec nos ados sur des questions qu’on n’envisage peut-être même pas encore! Parce que le but de l’éducation aux médias, c’est justement ça, n’est-ce pas? Cette occasion de se munir d’un bon coffre à outils permettant d’aiguiller la réflexion et de raffiner notre sens critique à tous, parents comme adolescents.

Ceci afin de prendre le meilleur du numérique, tout en évitant de tomber dans ses pièges éventuels.

Pour aller plus loin :

Ressource HabiloMédias : Le réseau des parents