Cyberintimidation - Aperçu

Pour la plupart des jeunes, Internet c’est avant tout un lieu où développer des relations et si la majorité des interactions sociales sont positives, un nombre croissant de jeunes se servent de la technologie pour intimider et harceler les autres – un phénomène qui a pour nom « cyberintimidation ».

Voici quelques statistiques pour illustrer l’ampleur du problème : environ un quart des jeunes disent avoir été la cible de cyberintimidation [1]. Cependant, le risque n’est pas le même pour tous les élèves. Plusieurs des facteurs qui exposent un jeune à l’intimidation hors ligne – la pauvreté [2], le handicap [3], le fait d’être membre d’une minorité visible [4] et le statut GLBT [5] – accroissent la possibilité qu’il soit aussi victime de cyberintimidation.

Le terme « cyberintimidation » n’est peut-être pas très juste. La définition traditionnelle de l’intimidation implique une inégalité de pouvoir ou de force entre l’intimidateur et la victime ; or, plusieurs des actes que les adultes qualifient de cyberintimidation se produisent entre des personnes ayant plus ou moins le même statut. De plus, en matière de cyberintimidation, il est parfois difficile de distinguer clairement entre la cible et l’intimidateur. Enfin, une bonne partie des comportements abusifs observés dans les relations hors ligne peuvent aussi se produire dans l’espace virtuel et la technologie numérique peut même encourager ces comportements.

A l'évidence, la cyberintimidation est traumatique pour les jeunes : un tiers des élèves qui ont été intimidés en ligne signalent des symptômes de dépression et ce chiffre grimpe à près de la moitié chez ceux qui ont vécu l’intimidation tant en ligne que hors ligne [6]. Malheureusement, les jeunes sous-estiment habituellement les torts que peut causer l’intimidation. Jennifer Shapka, chercheuse à l’Université de la Colombie-Britannique, a constaté que pour les jeunes, la majorité des comportements négatifs en ligne correspondent à une blague et elle est d’avis qu’il faut « sensibiliser les élèves au fait que ces " blagues" peuvent avoir de graves répercussions [7] ».

Si la cyberintimidation peut causer plus de préjudices que l’intimidation hors ligne, c’est en partie parce qu’elle est perpétrée en présence de témoins ou de collaborateurs invisibles, de sorte que la victime ne sait plus qui est au courant ou qui il faut craindre. La technologie décuple la portée que peut avoir l'intimidateur en lui permettant d'intimider partout et en tout temps. Il faudrait rapporter l'intimidation, mais comment parler de cette agression qui ne laisse pas de traces physiques, commise par des agresseurs sans nom ? En parler à un adulte, oui, mais les conséquences ne risquent-elles pas d'être pires que l'intimidation elle-même ? Les adultes veulent aider, mais beaucoup se sentent mal équipés pour traiter un problème d'intimidation dans le monde numérique.

 


[1] Patchin, J. W. & Hinduja, S. (2012). Cyberbullying: An Update and Synthesis of the Research. In J. W. Patchin and S. Hinduja (Eds.), Cyberbullying Prevention and Response: Expert Perspectives (pp. 13-35). New York: Routledge.
[2] Cross, E.J., R. Piggin, J. Vonkaenal-Platt and T. Douglas. (2012). Virtual Violence II: Progress and Challenges in the Fight against Cyberbullying. London: Beatbullying.
[3] Livingstone, S., Haddon, L., Görzig, A., Ólafsson, K., with members of the EU Kids Online Network (2011) ‘EU Kids Online Final Report’.
[4] Cross, E.J., R. Piggin, J. Vonkaenal-Platt and T. Douglas. (2012). Virtual Violence II: Progress and Challenges in the Fight against Cyberbullying. London: Beatbullying.
[5] Hinduja, S., and Patchin, J. (2011) ‘Cyberbullying Research Summary Factsheet: Bullying, Cyberbullying and Sexual Orientation’.
[6] Shari Kessel Schneider, Lydia O'Donnell, Ann Stueve, and Robert W. S. Coulter Cyberbullying, School Bullying, and Psychological Distress: A Regional Census of High School Students. American Journal of Public Health: janvier 2012, Vol. 102, No. 1, pp. 171-177.  
[7] Bellett, Gerry. “Cyberbullying needs its own treatment strategies.” The Vancouver Sun, 13 avril 2012.