Aperçu

La violence dans les médias est un sujet d’actualité récurrent depuis presque aussi longtemps que les médias de masse existent. Les causes de cette violence changent tous les deux ou trois ans : la musique, les réseaux sociaux, les jeux vidéo, les émissions de télévision et les films.

La critique de la violence dans les médias est souvent mêlée à des préoccupations de discrimination fondée sur la race, le sexe, l’âge ou la classe sociale : les médias imprimés, les émissions-débats et les nouvelles de fin de soirée[1] présentent souvent des histoires dans lesquelles le hip-hop et le rap sont exposés aux téléspectateurs comme des exemples d’un glissement de la culture contemporaine vers une dépravation violente.[2]

Compte tenu des points de vue divergents des chercheurs et des commentateurs culturels sur les effets de la violence dans les médias, il importe de définir les effets qui sont bien établis par des recherches fiables et de jeter un regard critique sur ce que nous pensons savoir. La violence dans les médias est un sujet très complexe et la question à savoir si celle-ci provoque la violence ne tient pas compte de la complexité des relations, des croyances et des impératifs économiques qui entourent le contenu médiatique de nature violente. Du point de vue de l’éducation aux médias, le plus important est de poser des questions clés sur la violence dans les médias.

  • Comment la violence est-elle utilisée dans les médias de masse?
  • Pourquoi est-elle si courante?
  • Y en a-t-il autant que je le pense?
  • Quels effets a-t-elle sur notre comportement? Sur nos attitudes? Sur notre façon de voir le monde?
  • Quelle est l’importance du contexte dans lequel elle apparaît?
  • Comment pouvons-nous y faire face?
  • Comment puis-je apprendre à mes enfants ou à mes élèves à y faire face?

Bien qu’il puisse existe un lien plus complexe et subtil entre la violence dans les médias et les comportements violents, le débat est dominé par une question : la violence dans les médias est-elle réellement à l’origine de la violence dans la réalité? C’est peut-être parce que le débat est au moins partiellement politique, entre ceux qui veulent censurer le contenu violent pour protéger les enfants et ceux qui considèrent la réglementation comme une pente glissante vers la censure ou un écran de fumée cachant les causes profondes de la violence dans la société.

À mesure que la technologie a progressé et que les médias sont devenus plus immersifs, depuis l’arrivée d’un train en gare des frères Lumière jusqu’aux jeux vidéo « de tir en vue subjective » d’aujourd’hui, les progrès en matière de technologie et l’immersion des médias ont amené les gens à craindre que les téléspectateurs et les joueurs ne perdent la distance qui les sépare des médias et qu’ils soient incités à commettre des actes de violence. Compte tenu que ces jeux se concentrent sur les armes, qu’ils comportent des couloirs provoquant la paranoïa caractéristiques de ces environnements et que le rôle du joueur est d’être seul juge, jury et bourreau, il est facile de voir la ligne de pensée qui lie ces types de jeux aux idées de violence de masse. En particulier, on a récemment davantage prêté attention à la possibilité que la violence dans les médias (en particulier les jeux vidéo) ait été un facteur contributif de la violence de masse, comme les fusillades à l’école secondaire Columbine (1999), à l’institut polytechnique de l’État de Virginie (2007), sur l’île d’Utøya en Norvège (2011), au Walmart d’El Paso (2019)[3], et à Christchurch en Nouvelle-Zélande (2019)[4]. Toutefois, en dépit de ces connexions suggestives, aucune relation claire n’a été établie entre la violence dans les médias (y compris les jeux vidéo) et la violence dans le monde réel.[5]

Une chose est certaine : la question de la violence dans les médias ne disparaîtra pas. Le débat semble s’orienter de plus en plus vers les « cultures de violence » et la normalisation de l’agression et du manque d’empathie dans notre société.

Les réalités des médias numériques compliquent d’autant plus ces problèmes. Par exemple, les nouvelles formes de médias sont interactives et se retrouvent partout, ce qui n’est pas le cas des formes narratives traditionnelles (comme les livres, les films et les émissions de télévision). Ainsi, compte tenu de l’accroissement pour les consommateurs de l’accessibilité à l’ensemble du contenu médiatique désiré et au moment souhaité, la perspective de censurer ou même de limiter l’accès aux médias violents est de plus en plus lointaine. Par conséquent, « il est crucial que les scientifiques mènent leurs travaux avec ouverture et rigueur si nous voulons construire une véritable compréhension des dynamiques positives et négatives et des impacts de la technologie dans la vie des gens[6] ».

 

[1] McWhorter, J. (2003). « How Hip-Hop Holds Blacks Back. » City Journal. Consulté sur le site http://www.city-journal.org/html/13_3_how_hip_hop.html

[2] (2008). « Swash, Rosie, Nas and Bill O’Reilly try to out-Fox each other. » The Guardian. Consulté sur le site http://www.guardian.co.uk/music/2008/jul/29/nas.and.bill.o.reilly.go.to.war

[3] Chavez, N. (2020). The suspect in the El Paso Walmart shooting is now facing federal hate crime charges. CNN. Consulté sur le site https://www.cnn.com/2020/02/06/us/el-paso-walmart-shooting-suspect-indictment/index.html

[4] (2020) Christchurch mosque attack: Brenton Tarrant sentenced to life without parole. BBC News. Consulté sur le site https://www.bbc.com/news/world-asia-53919624

[5] Kaufman, E (2019) Fact Check: are violent video games connected to mass shootings. CNN. Consulté sur le site https://www.cnn.com/2019/08/05/politics/violent-video-game-shooting-fact-check/index.html

[6] Warren, M (2019). These violent delights don’t have violent ends. The British Psychological Society. Consulté sur le site https://digest.bps.org.uk/2019/03/06/these-violent-delights-dont-have-violent-ends-study-finds-no-link-between-violent-video-games-and-teen-aggression/ [traduction]