Représentation de la religion dans les médias - Le christianisme

Les religions chrétiennes représentent aujourd’hui le groupe religieux le plus important du Canada avec plus de 70 pour cent de la population se définissant de confession chrétienne. La grande popularité du christianisme ne signifie pas pour autant que le traitement qu’en font les médias est toujours fidèle ou éclairé.

Michael Wakelin, ancien directeur du volet Religion et éthique pour la BBC, explique comment les journalistes s’imaginent souvent bien comprendre le christianisme du simple fait de sa popularité. Ils sont par conséquent plus souvent enclins à « attaquer » le christianisme dans leurs reportages à la télévision et dans les journaux alors qu’ils abordent les autres religions avec plus de prudence [1].

Darren Hewer, auteur d’un blogue religieux en ligne, écrit : « Les chrétiens sont des cinglés. C’est du moins le message qu’on semble vous transmettre quand vous lisez les actualités » [2]. Le « chrétien extrémiste » est un stéréotype courant véhiculé par les médias : on le décrit comme un chrétien ayant des opinions religieuses radicales et prêt à faire des choses extrêmes pour les défendre. Ces croyances et ces comportements sont présentés de façon dramatique, inhabituelle et excessive, et presque toujours dans un contexte négatif. On peut en voir un exemple dans le film 5150 rue des ormes, où la famille qui enferme et maltraite le personnage principal parlent et agissent comme s’ils font la volontée de Dieu. De par leur statut de chrétiens doublé de tyrans, on en fait automatiquement des chrétiens radicaux.

Mais d’où vient ce stéréotype ? Edward Caudill, professeur de journalisme, examine comment ce cliché fait appel à des valeurs communes des médias qui ne sont pas nécessairement compatibles avec une représentation responsable de la religion. Les histoires à saveur conflictuelle et dramatique sont essentielles si l’on veut générer des profits et fidéliser les lecteurs de journaux ou les téléspectateurs. C’est pourquoi certaines questions relatives au christianisme – le créationnisme entre autres – sont traitées en termes de guerres culturelles et de politique, où les points de vue des chrétiens sont carrément opposés à une autre facette du conflit présentée comme plus rationnelle. On présente ces histoires parce qu’elles correspondent à des valeurs journalistiques fondamentales d’impartialité « présentant les deux points de vue » [3]. De la même manière, les chrétiens sont souvent dépeints dans les médias comme des gens intolérants, racistes ou même violents – non pas parce que ces affirmations sont avérées mais parce qu’elles permettent de présenter le conflit plus facilement.

Un stéréotype similaire à celui du « chrétien extrémiste » est celui du « chrétien déchu » qui, ayant toujours affiché une moralité exemplaire, la perd en succombant à une quelconque tentation ou en commettant un péché. Comme dans le cas du « chrétien extrémiste », ce cliché possède un grand potentiel générateur de drames et de conflits, lesquels favorisent la consommation de médias. On peut en voir un exemple dans la télésérie Glee, où Quinn Fabray est représentée, dans les premiers épisodes, comme une bonne chrétienne, capitaine des meneuses de claques de son école secondaire, qui tombe finalement enceinte et se fait chasser de la maison par son père, un chrétien radical. Elle vivra ensuite une série de pertes - son amoureux, ses amis, son poste de capitaine et son statut social –, toutes dépeintes comme des conséquences de ses choix immoraux.

Le « jeune évangélique libéral » est un dernier stéréotype véhiculé par les médias sur le christianisme. On le représente sous les traits d’un jeune chrétien évangélique préconisant des prises de position de plus en plus libérales sur des questions sociales controversées. Bien que les jeunes évangéliques soient plus susceptibles de prioriser la protection de l’environnement, leurs positions sur d’autres questions sociales sont généralement aussi conservatrices, sinon plus, que celles de leurs homologues plus âgés [4].

 


[1] Bailey, M. (2010). Media, religion and culture: an interview with Michael Wakelin. Journal of Media Practice, 11(2), 185-189.
[2] Hewer, D. (2010). How the Media Screws Perspective. Power to Change. Accéder : 4 janvier 2011. http://powertochange.com/blogposts/2010/08/09/how-the-media-screws-perspective/
[3] Caudill, E. (2010). Intelligently designed: creationism's news appeal. Journalism & Mass Communication Quarterly, 87(1), 84-99.
[4] Johnson, B., & Smith, B. (2010). The liberalization of young evangelicals: a research note. Journal for the Scientific Study of Religion, 49(2), 351-360