Jeux de hasard : aperçu

Les jeunes Canadiens grandissent aujourd’hui dans une culture où le jeu de hasard est légal, facilement accessible – surtout en ligne – et généralement présenté comme un loisir inoffensif.

Les jeunes qui jouent à des jeux de hasard sont plus susceptibles que les adultes d’avoir des problèmes de jeu[1]. Environ 4 à 6 % des élèves canadiens du secondaire ont une dépendance au jeu et 10 à 14 % risquent d’en développer une, ce qui signifie qu’ils montrent déjà des signes de perte de contrôle sur leur comportement en matière de jeu[2]. Une étude réalisée en 2017 révèle que près du tiers des élèves ontariens de la 7e à la 12e année avaient joué à des jeux de hasard au moins une fois au cours de la dernière année[3].

Les jeunes se tournent de plus en plus vers les jeux de hasard sur Internet, lieu anonyme et pratique. Une étude sur des élèves du secondaire à Montréal révèle que 9 % d’entre eux ont déjà joué pour l’argent sur Internet[4]. Même s’ils ne recherchent pas des sites de jeux de hasard, les jeunes peuvent voir des publicités sur ce type de sites en ligne. Elles les présentent comme des jeux amusants, sociaux et sans risque[5], et peuvent être très efficaces : 4 jeunes sur 10 disent que les publicités sur les jeux de hasard leur donnent le goût de les essayer[6], et la fréquence à laquelle ils voient ces publicités est directement liée à leur intérêt pour les jeux de hasard[7].

Mais les jeunes n’ont pas besoin d’argent pour jouer en ligne et dès le jeune âge, ils apprennent que le jeu de hasard sur Internet est une activité amusante et inoffensive. Par exemple, plusieurs jeunes font des paris sportifs sur des sites qui offrent des prix aux meilleurs joueurs et plusieurs sites de réseautage social qui intéressent particulièrement les jeunes comprennent des applications de jeu gratuites.

En outre, un certain nombre de sites et d’applications Internet offrent aux jeunes l’option de jouer des jeux de hasard comme au casino, tels que les machines à sous et le blackjack, sans qu’ils aient à se servir d’argent – tout en affichant les gains et les pertes en dollars. Ce type de sites et d’applications enseignent aux jeunes à jouer, en brouillant la frontière entre l’argent réel et virtuel[8], espérant qu’ils seront plus portés à aller sur les sites qui utilisent de l’argent lorsqu’ils seront en possession d’une carte de crédit. Dans plusieurs cas, on constate que le taux de succès sur ces sites « d’entraînement » est plus élevé que sur les sites où il faut payer, ce qui est un moyen très efficace d’encourager les jeunes joueurs : un joueur sur quatre qui fréquente des sites de jeux de hasard gratuits va ensuite jouer à de vrais jeux de hasard en ligne[9].

L’entraînement aux jeux de hasard sur Internet commence bien avant l’adolescence. Bon nombre de jeux vidéo offrent maintenant des « coffres aux trésors », des articles intégrés aux jeux que les joueurs peuvent acheter au moyen d’argent réel et qui donnent des récompenses aléatoires, comme de nouvelles armes, de nouveaux pouvoirs ou des changements esthétiques pour les personnages[10]. Les coffres aux trésors ne sont pas tout à fait la même chose que les jeux de hasard : les joueurs obtiennent toujours quelque chose pour leur argent, bien que la valeur de ce qu’ils obtiennent puisse varier, mais en faire l’achat revient presque au même que de s’adonner aux jeux de hasard sur le plan psychologique[11] et des données probantes démontrent que leur achat est lié à un problème de jeu[12]. Les « skins » (des designs personnalisables pour les personnages) dans les jeux vidéo sont également utilisés pour le jeu : au moins un demi-million d’enfants du Royaume-Uni en auraient utilisé[13].

Le jeu en ligne est difficile à réglementer en raison des lois qui varient d’un pays et d’une province à l’autre. Certains pays, comme la Belgique, ont interdit la vente de coffres aux trésors dans les jeux vidéo, alors que d’autres pays ont adopté une approche axée sur la sensibilisation au problème.

Les jeunes peuvent aussi être exposés au jeu dans les médias traditionnels, comme les tournois de poker télévisés. En les regardant, les téléspectateurs sont alors plus réceptifs aux publicités sur les jeux de hasard[14]. Le jeu est aussi associé aux sports : en Australie, 3 enfants sur 4 âgés de 8 à 16 ans qui regardent des émissions de sports peuvent nommer au moins une entreprise de paris sportifs[15]. La hausse des sports électroniques, c’est-à-dire des compétitions professionnelles de jeux vidéo extrêmement populaires auprès des jeunes garçons, a entraîné la création d’une industrie du jeu qui leur est propre. Les revenus en découlant devraient atteindre 10 milliards de dollars américains en 2020[16].

En mai 2012, la Société canadienne de pédiatrie a publié un énoncé de politique sur les jeux de hasard chez les enfants et les adolescents.

Ses recommandations incluent les suivantes :

  • les médecins et les fournisseurs de soins de santé devraient procéder au dépistage des problèmes liés aux jeux de hasard, ainsi que du risque de dépression et de suicide chez les adolescents qui ont déjà un problème de jeu;
  • les parents devraient connaître les signes de problèmes de jeu et surveiller les activités en ligne de leurs enfants ainsi que leurs habitudes de jeu.
 

[1] Friend, K.B. & Ladd, G.T. (2009). Youth gambling advertising: A review of the lessons learned from tobacco control, drugs: Education, Prevention and Policy, 16(4): 283-297.

[2] Jeu problématique, Centre international d’étude sur le jeu et les comportements à risque chez les jeunes, Université McGill, http://youthgambling.mcgill.ca/Gambling2/fr/adolescents/adproblems_fr.php

[3] Boak, A., Hamilton, H. A., Adlaf, E. M., Henderson, J. L., & Mann, R. E. (2018). The mental health and well-being of Ontario students, 1991-2017: Detailed findings from the Ontario Student Drug Use and Health Survey (OSDUHS) (CAMH Research Document Series No. 47). Toronto, ON: Centre for Addiction and Mental Health.

[4] Derevensky, Gupta, et McBride, « Internet Gambling Among Youth: A Preliminary Examination », 2006. http://youthgambling.mcgill.ca/en/PDF/Newsletter/Summer2006.pdf

[5] Korn, D. ( 2005). Commercial gambling advertising: Possible impact on youth knowledge, attitudes, beliefs and behavioural intentions. Report for the Ontario Problem Gambling Research Centre, Guelph, ON.

[6] Derevensky, J., Sklar, A., Gupta, R., Messerlian, C., Laroche, M. & Mansour, S. (2007). The effects of gambling advertisements on child and adolescent gambling attitudes and behaviors. Report for http://www.fqrsc.gouv.qc.ca/programmes/bourses/index.html.

[7] Griffiths, M. (2017). The psychosocial impact of gambling in virtual reality. Casino & Gambling International, 29: 51 – 54.

[8] Drummond, A. & Dauer, J.D. (2018). Video game loot boxes are psychologically akin to gambling. Nature human behavior 2(8): 530 – 532.

[9] Kim, H. S., Wohl, M. J. A., Salmon, M. M., Gupta, R., & Derevensky, J. (2014). Do Social Casino Gamers Migrate to Online Gambling? An Assessment of Migration Rate and Potential Predictors. Journal of Gambling Studies, 31(4), 1819–1831. doi: 10.1007/s10899-014-9511-0

[10] Ore, J. (2017, October 29). Are loot boxes turning video games into slot machines? | CBC News. Retrieved May 22, 2020, from https://www.cbc.ca/news/entertainment/video-games-loot-boxes-1.4373079

[11] Drummond, A. & Dauer, J.D. (2018). Video game loot boxes are psychologically akin to gambling. Nature human behavior 2(8): 530 – 532.

[12] Zendle, D., Cairns, P., Barnett, H., & Mccall, C. (2020). Paying for loot boxes is linked to problem gambling, regardless of specific features like cash-out and pay-to-win. Computers in Human Behavior, 102, 181–191. doi: 10.1016/j.chb.2019.07.003

[13] Parent Zone. (2018). Skin gambling: teenage Britain’s secret habit.

[14] Lee, H.S., Lemanski, J.L. & Jun, J.W. (2008). Role of gambling media exposure in influencing trajectories among college students. Journal of gambling studies, 24: 25 – 37.

[15] Thomas, SL, Pitt, H, Bestman, A, Randle, M, Daube, M, Pettigrew, S 2016, Child and parent recall of gambling sponsorship in Australian sport, Victorian Responsible Gambling Foundation, Melbourne

[16] Griffiths, M. (2017). The psychosocial impact of gambling in virtual reality. Casino & Gambling International, 29: 51 – 54.