Signification et action dans les jeux

À la base, un jeu est créé à partir de plusieurs éléments essentiels : un objectif défini (le but final que les joueurs tentent d’atteindre), des règles (la structure formelle établissant ce qui peut et ne peut pas être fait), des obstacles (les éléments empêchant d’atteindre facilement l’objectif) et une dynamique centrale, c’est-à-dire « l’action principale d’un jeu, soit ce que le joueur fait la plupart du temps pour atteindre ses objectifs[1] ».

Règles de perception

Les jeux utilisent bon nombre des mêmes règles de perception que celles utilisées dans les médias visuels et vidéo : comme le dit le concepteur de jeux Jenova Chen : « Les éléments visuels sont très utiles pour aider à communiquer une gamme d’émotions. Il faut s’assurer que tous les sons, les éléments visuels, la jouabilité et la musique fonctionnent ensemble[2]. »

Image
Mario et Sonic le hérisson, personnages de jeux vidéo

Comme dans les bandes dessinées, la couleur et la forme sont des éléments importants de la conception des personnages. Les personnages simples sont définis et se distinguent par des formes basiques (les formes arrondies et les rectangles conviennent à Mario, la mascotte sympathique de Nintendo, tandis que la personnalité plus agressive de Sonic est symbolisée par les pointes triangulaires sur son dos). Le contraste est utilisé à la fois pour créer des effets émotionnels et aider les joueurs à gérer la quantité souvent accablante de détails visuels à l’écran[3]. Bien que les concepteurs de jeux vidéo n’aient pas le même contrôle sur la composition visuelle que dans les médias vidéo (dans la plupart des jeux, il y a soit une perspective fixe unique, soit les joueurs contrôlent l’emplacement de la « caméra »), le même effet peut être obtenu grâce à des personnages ou à des décors dont la hauteur ou la profondeur est exagérée, comme dans Shadow of the Colossus ou le plus récent Legend of Zelda[4], ainsi que dans les moments non interactifs ou les « scènes cinématiques[5] ». Les jeux présentent également un large éventail de styles visuels, allant du « pixel art » (ou l’art du pixel), qui rappelle les débuts du média, au quasi-photoréalisme. Certains jeux s’inspirent d’autres médias, comme les bandes dessinées et les animations, et utilisent souvent un style délibérément simple pour augmenter le contraste et la clarté[6]. Les jeux vidéo utilisent le son et la musique de la même manière que les médias vidéo, tandis que les jeux de rôle sur table sont principalement un média audio, offrant une intimité semblable à celle des balados.

Règles d’action

« Dans un film, il vaut mieux montrer que raconter, alors que dans un jeu vidéo, il vaut mieux agir que regarder. Offrez les meilleurs moments de l’histoire au joueur, et il ne les oubliera jamais. Mettez-les dans une scène cinématique et il s’ennuiera. » – Jordan Mechner, concepteur de Prince of Persia[7]

Les jeux se distinguent des médias traditionnels comme le cinéma ou la littérature par la présence d’une capacité d’agir et d’une interactivité[8]. Contrairement aux médias non interactifs, « les jeux n’orientent pas votre regard par une caméra contrôlée par le réalisateur, et ne vous obligent pas à écouter un dialogue particulier ni à progresser à un certain rythme. Ils vous invitent plutôt à entrer dans l’espace qu’ils créent[9]. » Jouer à un jeu ressemble plus « à participer à une course qu’à regarder un film ou à lire une nouvelle sur une course[10] ».

Les concepteurs de jeux travaillent principalement « dans le domaine de l’action », en façonnant soigneusement l’expérience du joueur en définissant les règles d’action du jeu, le « squelette de l’action pratique des joueurs dans ce monde[11] ». Les concepteurs parviennent à cette orientation et à cette communication grâce à la mise en œuvre de structures et de valeurs fondamentales.

Espaces de jeu

Dans les jeux, les joueurs doivent « apprendre à "lire" les environnements physiques dans lesquels ils se trouvent afin d’obtenir des indices sur la manière de progresser[12] ». Les concepteurs de jeux disposent de diverses techniques, dont certaines s’inspirent des règles de perception d’autres médias, pour orienter l’attention des joueurs dans un espace de jeu.

  • Vignettes de cause à effet : Des mises en scène montrant les conséquences d’un événement, comme des portes enfoncées, des véhicules accidentés ou des incendies, aident les joueurs à déduire les événements passés ou à anticiper les dangers à venir[13].
  • Objets à collectionner : Les objets à collectionner guident les joueurs dans une certaine direction ou marquent les zones visitées[14].
  • Couleur : Des couleurs contrastées mettent en évidence les objets ou les surfaces sur lesquels le joueur peut grimper[15].
  • Indices : Des traces de flèches ou de miettes guident les joueurs vers la prochaine destination[16].
  • Destinations : De grands bâtiments ou structures visibles servent de points de référence pour s’orienter[17].
  • Transformation de l’environnement : En revisitant des espaces familiers à la suite de changements (p. ex. nouveaux dommages ou altérations), les joueurs sont informés de manière plus naturelle sur l’évolution du récit ou les conséquences[18].
  • Conventions de genre : L’utilisation de tropes du genre comme les bateaux pirates et les manoirs hantés permet de puiser dans les connaissances narratives existantes des joueurs, guidant subtilement leurs attentes et leur exploration[19].
  • Lumières : Des lumières vives ou clignotantes indiquent des chemins ou des objets[20].
  • Cartes et panneaux : Les cartes et les panneaux fournissent une orientation et une direction[21].
  • Artéfacts narratifs : L’intégration d’indices narratifs comme des journaux ou des photos dans l’ensemble du jeu encourage les joueurs à enquêter et à reconstituer le contexte de l’histoire[22].
  • Point de vue : La façon dont le joueur perçoit l’espace du jeu (vue latérale, perspective à la première personne, carte ou grille aérienne, perspective isométrique) permet au concepteur de mettre en évidence (ou de dissimuler) des objets, des personnages ou des lieux[23].
  • Son : Des repères audio guident les joueurs vers des zones ou des objets spécifiques[24].
  • Texture : Les détails de surface, comme les chemins usés ou les traces de pas, suggèrent des itinéraires ou des interactions possibles[25].

Les joueurs peuvent contrôler plusieurs éléments ou un seul personnage qui les représentent dans le monde du jeu, appelés avatars. Ceux-ci peuvent être personnalisés à des degrés divers et, dans certains cas, changer au cours du jeu. Le lien entre le joueur et l’avatar « transcende l’identification aux personnages des romans ou des films puisqu’il est à la fois actif (le joueur agit activement) et réflexif, dans le sens où un joueur, une fois qu’il a fait certains choix concernant le personnage virtuel, se développe alors selon certains paramètres qui déterminent ce qu’il peut faire[26] », ce qui peut expliquer pourquoi les caractéristiques physiques des avatars, bien qu’elles n’aient généralement pas d’impact direct sur le jeu, influencent les actions des joueurs dans le jeu, un phénomène appelé l’« effet Proteus ». Dans certains cas, cet effet persiste même en dehors du jeu : personnifier un avatar sexualisé, par exemple, amène les joueurs à s’objectiver, même s’ils ne partagent pas le genre de l’avatar[27].

Communiquer le sens et guider l’action

Les jeux populaires communiquent leurs règles d’action par le biais de l’apprentissage exploratoire : dans le jeu classique Super Metroid, par exemple, l’avatar du joueur est piégé dans une fosse qui semble trop profonde pour qu’il puisse s’en échapper. Cependant, de petites créatures rebondissent sur les parois de la fosse, ce qui « incite subtilement le joueur à faire la bonne action sans le lui dire ouvertement[28] ». Ce processus, qui utilise la rétroaction pour mettre à jour le modèle mental de l’utilisateur, entraîne un moment de révélation où la maîtrise est atteinte.

Les concepteurs guident également l’expérience émotionnelle et esthétique du joueur[29]. Les jeux qui proposent « toute une gamme de capacités nécessaires pour résoudre les situations rencontrées » et exigent une certaine habileté dans l’utilisation de ces capacités sont essentiels pour éviter l’ennui et maintenir l’intérêt du joueur[30]. Si le rythme de dévoilement des défis est trop lent, le jeu peut être considéré comme insignifiant. S’il est trop rapide, le joueur peut perdre le contrôle et le percevoir comme une indisposition (« bruit »).

Cependant, l’orientation de l’utilisateur peut également avoir des effets négatifs. Souvent, il en résulte des tensions entre la maximisation du plaisir du joueur et la satisfaction des exigences commerciales, en particulier celles liées à la monétisation[31]. De nombreux jeux semi-payants, en particulier sur le marché des appareils mobiles, ne sont pas conçus principalement pour le plaisir. Ils sont plutôt « conçus pour créer des points faibles qui peuvent être soulagés par l’argent[32] ».

Ces techniques sont souvent qualifiées de « conception manipulatrice » ou de « tactiques trompeuses[33] ».

  • Dissimulation des coûts : En raison de l’utilisation de systèmes complexes de monnaie virtuelle, il peut être difficile pour les joueurs, en particulier les enfants, de faire un suivi de leurs dépenses et de comprendre la valeur réelle de l’argent[34].
  • Pression psychologique : Les abus dans la conception, comme l’utilisation de relations parasociales où un personnage pleure ou crie « Sauvez-moi! » ou le recours à des tactiques de style « crainte de passer à côté » lors du lancement d’événements à durée limitée[35], peuvent inciter les joueurs à jouer plus longtemps ou à faire des achats.
  • Exclusion commerciale : Les fonctionnalités ingénieuses ou les produits haut de gamme ayant tendance à être coûteux, ils « peuvent également être exclusifs », ce qui peut alors exclure certaines personnes[36].
  • Crainte de passer à côté : Les événements limités dans le temps créent un sentiment d’urgence, générant de la frustration liée à la menace d’une exclusion permanente du contenu souhaité si les joueurs n’agissent pas immédiatement[37].

Verbes du jeu

Le concept de « verbes » dans le contexte des jeux vidéo est une métaphore utilisée par les concepteurs de jeux pour décrire les règles d’action d’un jeu, ce que les joueurs sont autorisés à faire dans l’environnement du jeu et dans quelles circonstances : comme l’explique le concepteur de jeux Sid Meier, un bon jeu est « une série de choix intéressants[38] ».

Les verbes représentent la capacité d’action du joueur, c’est-à-dire sa capacité d’influencer les résultats par ses propres efforts[39]. Par exemple, dans un jeu de tir militaire comme Call of Duty, le verbe principal est « tirer » (sur des personnages non-joueurs). Dans un jeu comme Metal Gear Solid, l’espace de possibilités des verbes est plus large, offrant d’autres moyens d’atteindre des objectifs, comme la furtivité[40]. Ces verbes influencent la façon dont les joueurs se sentent et que ce qu’ils font : « Une personne qui écoute un film peut se réjouir lorsque le protagoniste gagne, mais il est peu probable qu’il éprouve un sentiment de responsabilité personnelle et de fierté. Comme ils dépendent des choix actifs du joueur, les jeux disposent d’une palette supplémentaire d’émotions sociales[41]. »

Par conséquent, les verbes font partie des mécanismes de jeu les plus importants puisqu’ils définissent ce qu’un joueur peut faire et l’effet de ces actions sur l’état général du jeu[42]. Ils sont souvent au centre de la conception des jeux : Dorian Hart, concepteur de l’influent jeu System Shock, a déclaré que son inspiration venait de son envie de créer un jeu « où les joueurs disposeraient de plus de verbes et ne feraient pas seulement que "tirer"[43] ».

Les verbes disponibles influencent la manière dont un joueur vit l’action, le récit et la créativité au sein du jeu, le plaçant ainsi sur un spectre de contrôle du joueur[44]. Par exemple, un jeu de tir militaire linéaire comme Call of Duty offre au joueur « peu d’interactivité et d’action » (moins de verbes) alors qu’un jeu de type « bac à sable » (comme Grand Theft Auto ou Minecraft) offre « une profusion de verbes à tout moment et impose très peu de contraintes au joueur pour suivre un seul chemin ». Dans ce type de jeux, les joueurs ont « beaucoup plus le rôle d’auteur ». À l’extrême opposé, il y a des jeux dans lesquels les actions du joueur ne se traduisent pas seulement par un contenu statique, mais par « des verbes complètement nouveaux qui n’existent que parce que le joueur les a mis là », souvent grâce à la programmabilité ou à un comportement émergent[45].

Cependant, lorsque la conception limite les verbes de manière inattendue, les joueurs peuvent ressentir de la frustration. Les jeunes enfants, par exemple, se sont « plaints que les jeux auxquels ils aimaient jouer ne leur permettaient pas toujours de faire ce qu’ils voulaient », en particulier lorsque les objets avec lesquels ils voulaient interagir étaient conçus comme des graphiques d’arrière-plan non réactifs[46]. Les jeux non numériques, comme les jeux de société et les jeux de rôle sur table, permettent aux joueurs de modifier les règles du jeu, et donc les verbes disponibles, d’une manière qui n’est généralement pas possible dans les jeux vidéo[47].

Les verbes offerts aux joueurs sont un élément puissant à travers lequel les valeurs sont intégrées dans les jeux[48]. Un jeu récompense ses joueurs lorsqu’ils adoptent ses préceptes. Par exemple, un pacifiste « ne peut pas gagner à Call of Duty sans tirer sur les ennemis du jeu », faisant du verbe « tirer » la récompense nécessaire pour progresser[49]. Les jeux étant également des mondes simulés, le fonctionnement des systèmes dans ces mondes peut influencer la façon dont les joueurs perçoivent leurs parallèles dans le monde réel : dans SimCity, par exemple, les joueurs doivent démolir les logements sociaux pour favoriser la croissance économique, tandis que le crime est réduit de manière plus efficace en plaçant un poste de police dans chaque quartier[50]. Même si les joueurs ne sont pas encouragés à tirer sur des ennemis ou à expulser des propriétaires, ni tenus de le faire, les jeux peuvent « nous menacer d’un fantasme de clarté morale » puisque toutes les actions dans un monde de jeu doivent être sans ambiguïté positives, négatives ou moralement insignifiantes[51] ». Selon le concepteur de jeux de société Reiner Knizia, les valeurs d’un jeu sont communiquées de manière très puissante par son système de notation puisque « c’est le pointage qui détermine le comportement des joueurs[52] ».

Si les valeurs et les croyances « s’ancrent dans les jeux, que les concepteurs le veuillent ou non[53] », ces derniers peuvent toutefois transmettre intentionnellement un contenu idéologique ou persuasif. Par exemple, la sculpture interactive Giant Joystick encourage la collaboration en rendant l’interface utilisateur gigantesque : « Les visiteurs ne peuvent pas jouer seuls avec le Giant Joystick. Une personne (ou parfois plusieurs) déplace la manette pendant qu’une autre appuie sur le bouton de tir en sautant dessus. » Cette expérience d’une activité isolée se transforme en « une joyeuse célébration du plaisir collaboratif[54] ». De la même manière, les concepteurs peuvent choisir de récompenser les joueurs qui s’engagent dans des « interactions coopératives et non violentes » afin de remettre en question l’idée selon laquelle les verbes codés comme masculins (comme se battre) sont plus désirables que les compétences codées comme féminines (comme soigner)[55].

Pourquoi jouons-nous?

Jouer est un choix motivé principalement par le plaisir ou le divertissement, mais les sources spécifiques de plaisir varient considérablement selon les personnes et les genres[56]. Les enfants âgés de 10 à 17 ans déclarent apprécier particulièrement les jeux qui leur permettent d’être créatifs, qui sont abordables, faciles à jouer et adaptés à leur âge[57]. Pour de nombreux joueurs, en particulier les jeunes générations, le jeu est avant tout une activité sociale[58] : parmi les adolescents qui jouent à des jeux vidéo, environ les trois quarts déclarent que « passer du temps avec les autres » est l’une des raisons pour lesquelles ils jouent[59].

Cependant, moins d’un préadolescent ou adolescent sur cinq déclare apprécier les jeux qui incluent des fonctionnalités de clavardage ou de messagerie[60], laissant penser qu’ils préfèrent communiquer avec leurs amis hors ligne pendant qu’ils jouent, en utilisant des canaux extérieurs au jeu lui-même, ce qui peut s’expliquer par les taux élevés de haine et de harcèlement au sein des jeux et des communautés de joueurs[61].

Au cœur du plaisir se trouve le principe de la motivation intrinsèque. Les jeux numériques sont très appréciés des enfants pour leur motivation intrinsèque et leur immersion[62]. La nature distinctive du média, définie par la capacité d’action, signifie que le joueur s’engage dans une « tentative volontaire de surmonter des obstacles inutiles[63] ». Les jeux servent d’« espace d’apprentissage dans lequel l’apprenant peut prendre des risques sans conséquences dans le monde réel[64] ».

Parmi les raisons générales qui poussent les gens à jouer à des jeux, citons « la volonté de relever des défis, d’acquérir et de mettre en pratique des connaissances et des compétences », « la volonté de créer », « la volonté d’explorer des identités et des intérêts profonds » et « la volonté de contrôler, de collectionner, de conserver et de se classer[65] ».

L’engagement des joueurs dans les défis et les accomplissements peut également être classé en différentes typologies.

  • Les champions sont « explicitement orientés vers les objectifs et motivés par les réalisations à long terme[66] ».
  • Les chercheurs « aiment expérimenter » et « sont fiers d’être les premiers à découvrir des fonctionnalités[67] ».
  • Les génies recherchent le plaisir dans « les problèmes qui nécessitent une prise de décision et une stratégie complexes pour surmonter les obstacles », comme la résolution d’énigmes[68].
  • Les conquérants recherchent activement les défis, n’aimant pas les victoires faciles et préférant « surmonter l’adversité[69] ».
  • Les socialisateurs « aiment passer du temps avec d’autres joueurs et partager des expériences de communion, de coopération et de discussion sur les stratégies de jeu[70] ». Pour les enfants qui ont de la difficulté à interagir en personne, l’engagement social par le biais du jeu numérique « peut constituer une source importante de liens sociaux[71] ».
  • Même les expériences généralement négatives peuvent être recherchées par certains joueurs : les survivants aiment « vivre des moments de terreur qui déclenchent un état d’excitation et d’éveil », alors que les téméraires apprécient « l’exaltation de la poursuite et la prise de risques et aiment généralement jouer avec le danger[72] ».

Une source principale de plaisir provient de la maîtrise des capacités et de la participation à des activités stimulantes[73]. Les jeux réussis induisent souvent une expérience optimale, décrite comme un « état optimal » qui maintient l’engagement des joueurs en leur offrant « une activité stimulante nécessitant des compétences », « des objectifs clairs » et « une rétroaction directe et immédiate[74] ». La satisfaction continue d’interagir de manière stimulante et imaginative procure un fort « sentiment d’accomplissement[75] ».

Les jeux décontractés, en particulier, se sont avérés fonctionner de manière semblable à la méditation de pleine conscience. Une étude a révélé « aucune différence statistiquement significative » entre le jeu occasionnel et la méditation pour réduire la pression artérielle et le rythme cardiaque[76]. De plus, le jeu numérique peut compenser les besoins insatisfaits de la vie quotidienne, en offrant une satisfaction dans des domaines comme l’autonomie, l’appartenance et la maîtrise, qui peuvent faire défaut dans d’autres environnements[77]. La possibilité d’utiliser le jeu pour « échapper à des situations difficiles dans le monde réel » et surmonter des « moments difficiles » est également un facteur de motivation important, en particulier pour les joueurs qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQ+[78].

Dans les jeux bien conçus, la frustration provient de l’écart entre les capacités du joueur et le défi qui lui est présenté : si le défi n’est pas assez grand, le joueur éprouve de l’ennui et de l’apathie, et si le défi est trop difficile, il en résulte « de l’anxiété et de la frustration[79] ». Cette tension est intentionnelle et nécessaire pour atteindre la maîtrise et le sentiment d’accomplissement, ce qui oblige le joueur à mettre à jour son modèle mental et à s’engager dans un apprentissage exploratoire qui l’amène à se dire que sa tentative n’a pas très bien fonctionné et qu’il doit essayer autre chose[80], jusqu’à ce qu’il atteigne un moment de révélation.

La frustration peut également être utilisée pour susciter de puissantes réactions émotionnelles et morales. Par exemple, dans les missions de Call of Duty qui exigeaient du joueur qu’il fasse du mal à des personnes innocentes, certains joueurs ont éprouvé des sentiments désagréables et des dilemmes moraux, les amenant à rechercher activement des actions alternatives, comme tirer sur le sol à l’aide de leur arme pour éviter de tuer des civils. La frustration d’être contraints de commettre un acte immoral les a amenés à s’engager plus profondément dans leurs propres valeurs morales[81].

Cependant, de nombreux jeux numériques, surtout ceux qui utilisent le modèle semi-payant, ne sont pas principalement conçus pour le plaisir, mais « pour créer des points faibles qui peuvent être soulagés par l’argent[82] », en concevant des expériences négatives et frustrantes afin de stimuler les microtransactions, ce qui relève souvent de la « conception manipulatrice » ou de tactiques trompeuses.

  • Pics de difficulté artificielle : Les concepteurs introduisent délibérément des « pics de difficulté artificielle » qui rendent soudainement le jeu « presque impossible à terminer sans bonus ». À ce stade, le jeu propose des solutions par le biais de bonus payants, capitalisant sur l’investissement et la frustration du joueur. Cette pratique de publicité agressive ciblant les joueurs lorsqu’ils « n’arrivent pas tout à fait à terminer un niveau » est fréquemment citée par les joueurs[83].
  • Monétisation de la qualité de vie de base : La frustration peut être provoquée en limitant intentionnellement les fonctions de base du jeu, à moins qu’un achat ne soit effectué. Les exemples incluent :
    • les « systèmes d’énergie » qui limitent le temps de jeu du joueur, à moins qu’il « n’attende ou ne paye »;
    • les limites d’espace d’inventaire (p. ex. Fallout 76 et Elder Scrolls) qui font en sorte qu’il est « difficile de profiter du jeu » sans acheter plus d’espace[84].
  • Frustration liée aux actions répétitives et à la progression : Certains jeux exigent des joueurs qu’ils s’adonnent à des « actions répétitives », c’est-à-dire des « tâches répétitives et souvent fastidieuses » nécessaires pour progresser. Les concepteurs peuvent intentionnellement frustrer les joueurs en ralentissant leur progression, les encourageant ainsi à effectuer un achat dans le jeu pour « éviter les actions répétitives » et progresser plus rapidement ou plus facilement[85].
  • « Plaisir désagréable » et frustration de la quasi-réussite : Les concepteurs utilisent des techniques pour donner au joueur l’impression qu’il a « presque gagné », ce qui déclenche une réaction de frustration qui incite les joueurs, à l’instar des parieurs, à revenir[86]. Une autre tactique consiste à créer un « plaisir désagréable », où les joueurs risquent de perdre quelque chose d’important s’ils ne font pas un achat[87].

Cette frustration est motivée par des raisons financières puisque le modèle semi-payant repose sur un petit pourcentage de joueurs assidus prêts à payer continuellement pour soulager les points faibles intégrés au jeu. Les concepteurs déterminent à quel moment les joueurs « éprouvent une grande frustration et meurent dans le jeu » à l’aide d’analyses de données afin d’optimiser le moment où ils doivent proposer des achats intégrés ou des vies supplémentaires[88].


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