Différences entre les sexes

Les études portant sur les aspects sexospécifiques du sextage montrent systématiquement que tandis que les garçons qui envoient des sextos sont peu critiqués, les filles qui le font sont perçues comme étant sexuellement immorales: on considère que les filles qui envoient des sextos utilisent leur sexualité pour obtenir de l’attention alors qu’on assume que les garçons (même si leurs sextos deviennent publics) le font pour obtenir l’attention d’un seul partenaire potentiel [1].

Cela pourrait expliquer pourquoi ceux qui partagent des sextos ne semblent pas considérer le partage comme un problème éthique : les filles qui envoient des sextos sont considérées comme si elles transgressaient les rôles sexués et, par conséquent, qu’elles abandonnaient le droit de s’attendre à ce que leur image ne soit ni partagée, ni transmise. Certains chercheurs estiment que les filles font face à des sanctions sociales en matière de sextage, qu’elles envoient des sextos ou non : les chercheurs sur le sextage de l’Université du Michigan Scott Campbell et Julia Lippman ont découvert que les garçons de la recherche décrivaient les filles qui envoyaient des sextos comme étant des « traînées » ou « manquant d’assurance », alors qu’ils caractérisaient les filles qui n’en envoyaient pas de « prudes » ou de « snobs ». Le sextage est donc une proposition perdante-perdante pour les filles. Leur comportement est évalué en termes durs et souvent sexistes, qu’elles envoient ou non des sextos [2].

Les rôles sexués contribuent à la perception selon laquelle le partage des sextos serait un acte positif, servant à la fois de sanction envers un comportement inapproprié des filles et de récompense par un gain de statut pour les garçons (certaines études démontrent que les garçons acquièrent un statut grâce au partage et au transfert des sextos qui leur sont envoyés) [3]. Les recherches de HabiloMédias [4] indiquent que l’adoption d’attitudes traditionnelles quant au genre, comme croire que les hommes devraient s’intéresser davantage au sexe que les femmes ou que les femmes ne peuvent pas vraiment être heureuses sans conjoint, est étroitement liée à la probabilité que les jeunes aient partagé les sextos de quelqu’un : la moitié (53 %) de ceux qui croyaient fortement à des stéréotypes de genre traditionnels avaient partagé un sexto, comparativement à un peu plus d’un sixième (18 %) qui avaient des croyances neutres et à seulement 1 sur 10 (9 %) de ceux qui n’avaient pas ces croyances. Comme il fallait sans doute s’y attendre, cet effet était plus puissant chez les garçons et les jeunes hommes de l’étude, mais il était également important chez les filles et les jeunes femmes.


[1] Peskin, Melissa Fleschler, Christine M. Markham, Robert C. Addy, Ross Shegog, Melanie Thiel, et Susan R. Tortolero. « Prevalence and Patterns of Sexting Among Ethnic Minority Urban High School Students ». Cyberpsychology, Behavior, and Social Networking, 16.6 (2013): 454-59. Imprimé.
[2] Madrigal, Alexis C. « On Teen Sexting: Same Sexism, Different Technology », The Atlantic, 18 juin 2014.
[3] Ringrose, J., Harvey, L., Gill, R. et Livingstone, S. (2013) Teen girls, sexual double standards and ‘sexting’: Gendered value in digital image exchange, Feminist Theory 2013.
[4] Johnson, M., Mishna, F., Okumu, M., Daciuk, J. Partage non consensuel d’images intimes : les comportements et les attitudes des jeunes Canadiens, Ottawa : HabiloMédias, 2018.