Principaux stéréotypes masculins dans les médias

Plusieurs chercheurs et universitaires ont décelé l’existence d’une variété de stéréotypes chez les personnages masculins mis en avant dans les médias.

Le rapport If He Can See It, Will He be it? Representations of Masculinity in Boys’ Television soulève les stéréotypes populaires que certains experts appellent le « modèle masculin », qui restreint l’identité des hommes et des garçons, et qui sont renforcés et parfois créés par les tropes médiatiques observés dans les films et les publicités ainsi qu’à la télévision[1]. Les sept piliers sont les suivants.

QU’EST-CE QUE LE « MODÈLE MASCULIN »?

Selon Michael Flood, spécialiste de la masculinité, ce concept décrit les stéréotypes qui limitent la façon dont les hommes et les garçons se perçoivent et se comportent.

  • Autosuffisance : Les hommes doivent s’occuper de leurs propres problèmes, et parler de leurs problèmes ou de leurs craintes risque d’inciter les autres à ne pas les respecter.
  • Jouer les durs : Les hommes doivent se montrer forts, même s’ils ont peur, et refuser de se défendre si quelqu’un les malmène est un signe de faiblesse.
  • Rôles sexospécifiques rigides : Les hommes doivent gagner un salaire élevé et ne doivent pas s’occuper des tâches ménagères à la maison. Les garçons ne doivent pas apprendre à faire des tâches traditionnellement féminines, comme la cuisine ou le ménage, ni être censés de le faire.
  • Hétérosexualité et homophobie : Seuls les hommes hétérosexuels et cisgenres sont de « vrais » hommes.
  • Hypersexualité : Les hommes ne devraient jamais dire non au sexe.
  • Beauté physique : Un homme doit être physiquement attirant, mais ne doit pas se préoccuper de son apparence.
  • Agressivité et contrôle : Les hommes méritent d’avoir un certain contrôle sur leur partenaire et devraient avoir le dernier mot sur tout ce qui concerne le foyer ou les relations[2].

Les personnages masculins à la télévision correspondent souvent au « modèle masculin ». Par exemple, ils sont moins susceptibles de montrer des émotions que les personnages féminins, notamment l’empathie.

  • Les personnages masculins sont susceptibles d’être montrés comme étant exceptionnellement musclés.

Ils sont moins susceptibles d’être montrés dans un rôle parental actif que les personnages féminins (4,5 % par rapport à 7,7 %); « Accepter un refus comme réponse est rare dans les émissions de télévision populaires pour garçons », et les personnages masculins commettent également 62,5 % des actes de violence comparativement à 37,5 % des personnages féminins. [3]

SOUS LES PROJECTEURS : LA PATERNITÉ DANS LES MÉDIAS

La représentation de la paternité dans les médias est un bon exemple : l’inversion d’un stéréotype ne contribue pas à l’améliorer, et elle peut même aggraver la situation. Alors que les pères dans les médias sont passés du statut de patriarche sévère à celui d’aimable idiot[4], les pères d’aujourd’hui dans les médias sont en fait moins susceptibles d’être vus en train d’éduquer leurs enfants et, lorsqu’ils le font, ils sont plus susceptibles d’être mauvais dans leur rôle[5] et d’avoir généralement l’air « d’incompétents marrants » dans toutes les tâches ménagères qu’ils essayent d’accomplir[6]. Comme le dit l’auteure Liz Plank, « ces messages façonnent et influencent la perception et le traitement des pères[7] », mais peuvent aussi avoir une influence intergénérationnelle : la meilleure façon de prédire l’opinion des enfants sur le rôle des hommes et des femmes est d’observer le temps que leur père consacre aux tâches ménagères[8].

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A still from the animated series Bluey showing Bluey's father reading to her and her sister.

Heureusement, il existe des données probantes selon lesquelles les représentations médiatiques sont en train de changer. Des films comme Bruiser et A Thousand and One montrent des images plus complexes de la paternité et du mentorat masculin[9], tandis que des séries télévisées populaires comme This is Us offrent un éventail de représentations de fournisseurs de soins masculins[10]. La série animée Bluey est peut-être l’exemple le plus marquant dans les médias pour enfants : le père du personnage principal, Bandit, « est un père décontracté, mais plein de ressources qui s’occupe beaucoup des enfants au quotidien ». S’inspirant largement de l’expérience du créateur, Joe Brumm, en matière de paternité, la série dépeint Bandit comme « l’exemple parfait du père attentionné de notre époque. On peut déceler un brin de nostalgie de sa part, mais pas le moindre regret. Bandit est heureux de son choix. Il l’a accepté. Et c’est un si bon choix[11]. »

Les industries médiatiques ont souvent une vision stéréotypée des garçons en tant que consommateurs de médias. Dans le monde de l’édition, par exemple, la sagesse conventionnelle veut que les garçons préfèrent les ouvrages non romanesques et ne lisent que des livres sur les « trucs de garçons ». Cependant, des recherches ont montré non seulement que les garçons, comme les filles, préfèrent en fait les ouvrages de fiction[12], mais aussi que les efforts déployés pour attirer les garçons vers ce que nous supposons qu’ils aiment peuvent se retourner contre nous : « En effet, les façons dont nous essayons souvent de mobiliser les garçons en matière d’éducation sont celles qui les en dissuadent : ce n’est pas parce que vous leur donnez toujours des livres sur le football qu’ils vont s’intéresser à la lecture[13]. »

Les garçons sont moins susceptibles que les filles de recenser les stéréotypes dans les médias lorsqu’ils les voient et peuvent être plus vulnérables à l’« effet de la troisième personne », dans lequel les gens voient les médias comme ayant une plus grande influence sur les autres que sur eux-mêmes[14]. De même, les recherches ont montré que les garçons sont moins conscients que les filles de la façon dont les images des publicités sont manipulées, et que ceux qui n’en sont pas conscients sont plus susceptibles de croire qu’un corps masculin « parfait » est possible[15]. La pression commerciale que ressentent les acteurs masculins renforce cette idée : « obtenir un rôle dans des films d’action, et en particulier les films de superhéros, est une façon de devenir une vedette. À quelques exceptions près, cette pression signifie que leur corps doit avoir l’air de celui d’un superhéros[16]. » Ceux qui ne sont pas conscients de la manière dont les images sont manipulées, et qui ne connaissent pas les raccourcis, comme les stéroïdes et les médicaments amaigrissants, que prennent les acteurs pour avoir ces corps de superhéros, sont plus susceptibles de croire qu’un corps masculin « parfait » est possible[17]. Les garçons subissent des pressions pour atteindre et maintenir une apparence idéalisée et, en même temps, ne pas donner l’impression qu’ils se soucient de leur apparence[18].


[1] If He Can See It, Will He Be It? Representations of Masculinity in Boys' Television (Rep.). (2020). Geena Davis Institute on Gender in Media.

[2] The Men’s Project & Flood, M (2020), Unpacking the Man Box: What is the impact of the Man Box attitudes on young Australian men’s behaviours and wellbeing? Jesuit Social Services: Melbourne

[3] If He Can See It, Will He Be It? Representations of Masculinity in Boys' Television (Rep.). (2020). Geena Davis Institute on Gender in Media.

[4] Cantor, M. G. (1990). Prime‐time fathers: A study in continuity and change. Critical Studies in Media Communication, 7(3), 275-285.

[5] Scharrer, E., Warren, S., Grimshaw, E., Kamau, G., Cho, S., Reijven, M., & Zhang, C. (2021). Disparaged dads? A content analysis of depictions of fathers in US sitcoms over time. Psychology of Popular Media, 10(2), 275.

[6] Common Sense Media (2017) Watching Gender: How stereotypes in Movies and on TV Impact Kids’ Development. Retrieved from https://wnywomensfoundation.org/app/uploads/2017/08/16.-Watching-Gender-How-Stereotypes-in-Movies-and-on-TV-Impact-Kids-Development.pdf

[7] Plank, L. (2019). For the love of men: From toxic to a more mindful masculinity. St. Martin's Press. [traduction]

[8] Cano, T., & Hofmeister, H. (2023). The intergenerational transmission of gender: Paternal influences on children's gender attitudes. Journal of Marriage and Family, 85(1), 193-214.

[9] Weaver, J. (2023) A Thousand and One and the evolving depiction of masculinity on-screen. CBC News. https://www.cbc.ca/news/entertainment/masculinity-onscreen-1.6804850

[10] Ashton, D., et al. (2022) This is Us? How TV Does and Doesn’t Get Men’s Caregiving. Geena David Institute on Gender in Media. https://seejane.org/wp-content/uploads/Mens-Caregiving-Report-2022-v2.pdf

[11] Benedictus, L. (2016) Bluey: How a Cartoon Dog Became Your Ultimate Guide to Fatherhood. The Father Hood. https://www.the-father-hood.com/article/bluey-how-a-cartoon-dog-became-your-ultimate-guide-to-fatherhood/ [traduction]

[12] Earp, J. (2021) Boys prefer non-fiction? Challenging the myth. Teacher Magazine. https://www.teachermagazine.com/au_en/articles/boys-prefer-non-fiction-challenging-the-myth

[13] Equimundo. (2022). The State of UK Boys: Understanding and Transforming Gender in the

Lives of UK Boys. Washington, DC: Equimundo [traduction]

[14] Liu, H. (2020). Early adolescents' perceptions and attitudes towards gender representations in video games. Journal of Media Literacy Education, 12(2), 28-40. https://doi.org/10.23860/JMLE-2020-12-2-3

[15] Credos. (2016) Picture of Health? (Rep.)

[16] Abad-Santos, A. (2021) The open secret to looking like a superhero. Vox. https://www.vox.com/the-goods/22760163/steroids-hgh-hollywood-actors-peds-performance-enhancing-drugs [traduction]

[17] Credos. (2016) Picture of Health? (Rep.)

[18] Norman, Moss. Embodying the Double-Bind of Masculinity: Young Men and Discourses of Normalcy, Health, Heterosexuality, and Individualism. Men and Masculinities, Sept 17 2011