Éthique et propriété intellectuelle

Certaines des décisions éthiques les plus communes auxquels les jeunes sont confrontés en ligne concernent la propriété intellectuelle, mais il peut être particulièrement difficile d’enseigner aux jeunes à respecter la propriété intellectuelle puisqu’ils pourraient ne pas la considérer comme une question éthique. 

Il s’agit là d’un autre cas où les jeunes se comportent mieux qu’ils ne le pensent : seul 1 jeune sur 5 déclare avoir accédé à du contenu numérique de manière illégale au cours des 12 derniers mois[i], préférant accéder à des médias virtuels à partir de sources légitimes comme YouTube et iTunes[ii], mais seulement un tiers des élèves de 10e année pensent que c’est mal de le faire[iii].

Quatre raisons principales peuvent expliquer ce phénomène.

  • L’accès aisé au contenu non autorisé en ligne nous donne moins de temps pour penser à l’éthique ou aux possibles conséquences.
  • Dans les médias numériques, il est plus facile de ne pas ressentir d’empathie pour les gens touchés par nos actions.
  • Les codes sociaux de la culture des jeunes, où la diffusion, le partage et le téléchargement constituent la norme [4], peuvent amener les enfants à penser qu’il n’y a rien là.
  • Il existe beaucoup de confusion, parmi les jeunes et les adultes, quant à l’accès légal et éthique de contenu en ligne.[iv]

La confusion vient en partie du fait que si certaines activités sont clairement contraires à l’éthique (comme le téléchargement illégal de films), de nombreuses activités courantes, comme l’écriture de fanafiction ou l’utilisation de musique protégée par le droit d’auteur dans une vidéo personnelle, sont moins claires. De plus, un nombre important de jeunes disent qu’ils ne savent souvent pas si les sources médiatiques qu’ils utilisent sont légitimes ou non[v], ce qui peut expliquer pourquoi les élèves canadiens disent vouloir apprendre « ce qu’il est légal et illégal de faire en ligne » plus que tout autre sujet lié aux ordinateurs et à Internet[vi].

Pour ajouter au défi, la plupart des lois sur le droit d’auteur sont trop compliquées pour les enfants (et les adultes) et évoluent toujours en fonction des nouvelles technologies.

Respect de la propriété intellectuelle en ligne

Étant donné toutes ces difficultés, une approche beaucoup plus simple et plus facile à gérer consiste à promouvoir le respect des créateurs et des détenteurs de droits d’auteur de contenu en ligne. En d’autres termes, avant de regarder ou d’écouter des médias en ligne ou d’y jouer, nous devons déterminer si nous le faisons d’une façon qui respecte les gens qui l’ont créé et à qui le contenu appartient.

Pour ce faire, nous devons faire preuve d’empathie. Toutefois, les jeunes pourraient ne pas ressentir d’empathie pour les créateurs de médias comme les musiciens et les cinéastes, surtout s’ils ont du succès, et même encore moins à l’égard des entreprises qui détiennent le droit d’auteur de ce qu’elles ont créé.

Il est important de rappeler aux enfants que pour survivre, les artistes et les créateurs doivent faire de l’argent. Étant donné tout le contenu gratuit disponible en ligne, si un contenu n’est pas gratuit, c’est parce que le créateur s’attend à être payé. Les enfants croient que de léser une entreprise médiatique n’est pas la même chose que de léser une personne.[vii] Nous devons donc également leur expliquer que le droit d’auteur est une partie importante de la façon dont les artistes et les autres parties intéressées qui travaillent dans la communauté créative gagnent leur vie, et c’est ce qui leur permet de continuer à créer des œuvres. Il faut rappeler aux enfants que lorsqu’un artiste crée une œuvre, il la possède et mérite de contrôler ce qui en arrive. Nous pouvons également aider les enfants à comprendre que les sites qui profitent illégalement des œuvres d’autres personnes non seulement nuisent aux créateurs, mais constituent également un risque pour la vie privée et la sécurité des utilisateurs.

L’illégalité du téléchargement, de la diffusion et de la distribution non autorisés ne semble pas arrêter les jeunes, ou les consommateurs en général. Plutôt que de se concentrer sur « les lois », les règles familiales peuvent encourager les enfants à penser de façon éthique quant à l’utilisation de contenu en ligne. Manifestement, le fait de bien communiquer vos attentes quant au respect qu’ils doivent manifester à l’égard des créateurs et des détenteurs de contenu en ligne fait partie de vos valeurs familiales. Contrairement aux jeunes enfants, qui sont fortement motivés par la peur des punitions et le désir de récompenses, les adolescents sont davantage motivés par le désir de s’intégrer. Ils se tournent donc vers les valeurs du groupe pour guider leur moralité, et si leur famille ne leur fournit pas de conseils, ils seront principalement influencés par leurs pairs et les médias populaires. La recherche de HabiloMédias a démontré que les élèves assujettis à une règle à la maison quant à ce qu’il est approprié de télécharger étaient considérablement moins susceptibles de télécharger des films, de la musique ou tout autre type de contenu de façon illégale. Cependant, la probabilité d’une telle règle à la maison est de loin inférieure chez les élèves plus âgés (50 p. 100 en 4e année et à peine 15 p. 100 en 11e année), ce qui pourrait expliquer pourquoi les élèves plus âgés estiment que le téléchargement illégal n’est pas une question éthique.[viii]

Que doivent savoir les jeunes à propos de la propriété intellectuelle? Ils doivent d’abord savoir où et quand ils peuvent utiliser les médias légalement et gratuitement. Notre fiche-conseil sur L’accès légal au contenu explique comment faire par l’intermédiaire d’un nombre grandissant de sites et de services légitimes, le domaine public, Creative Commons, et les exemptions de l’utilisation équitable, alors que notre atelier « Explorer les achats et le divertissement en ligne » peut vous aider à trouver des sources payantes et gratuites de contenu en ligne légitime.

D’un point de vue éthique, le concept est simple : avant de regarder ou d’écouter des médias virtuels ou d’y jouer, nous devons déterminer si nous le faisons d’une façon qui respecte les créateurs et les détenteurs. Bien que les lois sur le droit d’auteur soient compliquées, nous pouvons enseigner aux jeunes l’importance de traiter les créateurs de contenu avec respect en des termes qu’ils peuvent comprendre.

  • Ce n’est pas parce qu’un contenu est en ligne que vous pouvez le prendre et l’utiliser.
  • Pour le contenu que vous êtes autorisé à utiliser, attribuez toujours le mérite à la personne ou à la société qui en détient le droit d’auteur.
 

[i] (2019) 2019 Intellectual Property and Youth Scoreboard. European Union Intellectual Property Office. Retrieved from https://euipo.europa.eu/tunnel-web/secure/webdav/guest/document_library/observatory/documents/IP_youth_scoreboard_study_2019/IP_youth_scoreboard_study_2019_en.pdf

[ii] Steeves, V. (2014). Jeunes Canadiens dans un monde branché, Phase III : La vie en ligne. HabiloMédias. Consulté sur le site https://habilomedias.ca/jcmb/vie-en-ligne

[iii] Steeves, V (2014). Jeunes Canadiens dans un monde branché, Phase III : Experts ou amateurs? Jauger les compétences en littératie numérique des jeunes Canadiens. HabiloMédias. Consulté sur le site https://habilomedias.ca/jcmb/experts-ou-amateurs-jauger-competences-litteratie-numerique

[iv] Steeves, V. (2014). unes Canadiens dans un monde branché, Phase III : Experts ou amateurs? Jauger les compétences en littératie numérique des jeunes Canadiens. HabiloMédias. Consulté sur le site https://habilomedias.ca/jcmb/experts-ou-amateurs-jauger-competences-litteratie-numerique

[v] (2019) 2019 Intellectual Property and Youth Scoreboard. European Union Intellectual Property Office. Consulté sur le site https://euipo.europa.eu/tunnel-web/secure/webdav/guest/document_library/observatory/documents/IP_youth_scoreboard_study_2019/IP_youth_scoreboard_study_2019_en.pdf

[vi] Ibid.

[vii] Hill, A. (2013). Internet users unaware of illegal downloading. The Guardian. Consulté sur le site http://www.theguardian.com/technology/2013/apr/22/internet-users-unaware-illegal-downloading

[viii] Cheng, J. (2011). Students: Shoplifting CDs worse than downloading music via P2P. Ars Technica. Consulté sur le site http://arstechnica.com/science/2011/04/students-shoplifting-cds-worse-than-downloading-music-via-p2p/