Les enfants face aux images du tremblement de terre d'Haïti

Un homme à terre baignant dans une mare de sang, un enfant couvert de poussière pleurant son désespoir, des gens hagards, et des décombres partout ; façades éventrées d'immeuble, voitures défoncées, palais présidentiel disloqué, … voilà les images qu'on pouvait voir dans tous les médias ces derniers jours – si vous avez été épargné, c'est que vous n'étiez sans doute pas sur Terre.

Les enfants n'ont évidemment pas échappé à la couverture médiatique du tremblement de terre d'Haïti : comme j'ai pu la constater grâce à mes propres enfants, l'événement était un sujet de conversation majeur dans les cours de récréation ces derniers jours.

Il existe tout un corpus de recherches étudiant l'impact sur les enfants de la représentation de la violence dans les médias. Mais bizarrement, toute cette recherche se concentre essentiellement sur la représentation de la violence dans les films de fiction ; il n'existe qu'une recherche minimale et parcellaire sur l'impact des images choquantes rencontrées dans les actualités.
Et pourtant, il semble que les images d'événements traumatiques réels marquent beaucoup plus les enfants que des images de fiction. Comme le dit Henry Jenkins, professeur de communication au MIT, les études portant sur les effets médiatiques suggèrent que les enfants « sont plus susceptibles d'être émotionellement touchés par des contenus qui représentent une violence réaliste, et particulièrement par les images de violence dans les films documentaires. »

De plus, selon le Rapport Brisset, « Les (images de violence les) plus intolérables sont celles auxquelles il est impossible de donner un sens quelconque, c'est-à-dire les messages qui présentent la violence comme une entreprise gratuite d'anéantissement (…) sans aucun élément de compréhension. Dès lors qu'il y a interprétation possible, souligne le Pr. Jeammet, dès qu'il y a débat avec d'autres, en particulier avec des adultes, s'instaure alors une forme de pondération, de limitation, de distance ».

Comment interpréter pour nos enfants les images du tremblement de terre d'Haïti ? Ne sommes-nous pas là en présence de ce qui est décrit comme la situation la plus destructrice pour les enfants : celle qui s'abat arbitrairement sur une population sans qu'on puisse lui donner du sens ? La violence vient des éléments eux-mêmes, il n'y a pas de « responsable ».

Puisqu'il ne peut se dégager qu'un sentiment d'impuissance du côté des causes, il faut donc mettre en valeur auprès de l'enfant ce que l'on peut faire pour aider les populations touchées : parlez-leur de ce qu'on peut faire pour les aider.

Si vous décidez de faire un don, incluez vos enfants dans le processus, de façon à ce qu'ils n'aient pas le sentiment qu'on leur a montré une catastrophe devant laquelle ils sont totalement impuissants. Profitez-en pour leur expliquer ce qu'est l'aide humanitaire.

Selon l'âge de vos enfants, vous pouvez chercher avec eux ou leur donner la mission de rechercher à quelle organisation vous voulez faire un don, en visitant leurs sites et voyant concrètement ce que chacune projette de faire avec les dons. Dirigez vos enfants sur les sites d'organisation reconnues comme la Croix rouge, Oxfam, ou Médecins sans frontières. Attention aux fraudeurs, ne donnez qu'à des organismes reconnus !

A la suite de cela, ne manquez pas de souligner auprès de vos enfants l'aide de l'organisation à qui vous avez donné, à chaque fois qu'elle est mentionnée dans les actualités. De cette façon, ceux-ci verront concrètement comment leur donation se transforme en action sur le terrain.

En même temps qu'une façon de « digérer » les images d'Haïti, cette recherche humanitaire en ligne peut donner à votre enfant une première expérience tangible vers la citoyenneté digitale et un sentiment d'appartenance au « village global ».

Vous trouverez des conseils complémentaires dans les fiches-conseils du Réseau permettant d'aider les parents à médiatiser l'impact des images violentes auprès de leurs enfants :

Comment éviter que les jeunes soient bouleversés par la couverture médiatique de guerres ou de catastrophes

L'enfant et les nouvelles